/Ce texte, je l'ai écrit en Juin 2003. Je ne sais pas s'il est correct que je le publie ici mais ... je le fais quand même.
Il n'est pas une fiction, mais une confession. J'ai dit à plusieurs d'entre vous que je n'avais fait que des écrits "personnels", voilà celui que j'ai choisi de vous faire lire./
Un soir de juin …
Je suis à mon bureau, devant l'écran de mon PC
Je paufine encore et encore mon mémoire pour mon concours. La soutenance est pour dans deux jours, je n’arrive même pas à stresser. Je fais les choses de façon mécanique, je me relis, me corrige, mais je ne suis totalement dedans.
La tasse de thé près de moi est froide depuis des heures, je l’ai préparé mais n’en ai même pas bu une gorgée.
Je ne suis pas là. Je laisse courir ma plume sur le bloc note à coté de moi.
P'tit frère ...
Près de 6 mois déjà que tu es parti et je crois que c’est seulement maintenant que je réalise, que je commence à comprendre. Tu n’es plus là, tu ne seras plus jamais là.
J’ai visionné pour la première fois hier soir le DVD que papa a fait sur les dernières années de ta trop courte existence et cela m’a fait un mal de chien. Te revoir, entendre ta voix, ton rire, comme si tu étais bel et bien vivant. T’écouter parler de tes projets d’avenir.
Tu as vécu tellement de belles choses pour ton jeune âge. Qui d’entre nous à 22 ans a eu ta chance ? Avoir vécu et travaillé deux ans aux Etats-Unis,avoir voyagé partout, exercer son métier avec passion dans l’un des plus beaux palace de la planète (Lausanne Palace en Suisse).
Mais tu avais tant d’autres choses à vivre encore.
Je te revois comme si c'était hier, le soir de Noël, dans la cuisine avec Maman à nous préparer le dîner. Vous discutiez, si complices, comme jamais aucun de nous tous ne l’a jamais été.
« Maman tu sais, je crois que maintenant que je suis posé, que j’ai un boulot et ma vie en Suisse , je vais enfin pourvoir songer à mon avenir, à trouver quelqu’un pour partager ma vie et à fonder ma famille. »
J’ai sourit en entendant ces mots, et je me suis éclipsée.
Savais-tu ce jour là que 8 jours plus tard, la mort t’attendait au détour d’un virage?
« Bonne année ma sœur »
Dernier Texto de toi, tapé sur ton portable deux heures avant … Je t’ai répondu à 16h57, tu n’étais déjà plus parmi nous mais je le savais pas
Moi j’ai reçu l’accusée de réception, m'étonnant juste de ne pas avoir eu de réponse, et promettant de te rouspéter le soir même.
Il ne fallait pas faillir à la tradition, de Suisse tu es parti le matin du premier janvier pour passer ce jour avec la famille. De Paris, j’arrivais également et Brice n’allait pas tarder lui non plus à nous rejoindre.
Le 31 c'était les copains, le 1er c'était la famille, habitude quand tu nous tiens.
Mais ce soir là, au lieu de fêter la nouvelle année, nous te pleurions.
Le film repasse en boucle les gendarmes devant la porte de la maison, les mots de Papa : « Rémy a eu un accident de voiture, il est mort », le hurlement de Maman quand il le lui a annoncé, l’incompréhension de nos petites sœurs, trop jeunes pour comprendre.
Bonne année.
A ce moment là, je ne comprenais rien, je téléphonais machinalement à tous nos proches, leur assénant la nouvelle comme un robot, prenant à peine conscience de l'horrible vérité.. Puis j’ai organisé seule, car personne d’autre n’en avait la force, ton enterrement. Je devais le faire. Quand ce fut finit, j’ai bataillé des mois avec les assurances, je ne voulais pas lâcher et j’ai gagné.
Gagné quoi … cela ne t’a pas ramené…
J’ai l’impression que je comprends seulement maintenant.
Je ne sais pas comment nous allons réussir à surmonter cela, sans toi à nos côtés, sans ton sourire, sans entendre tes blagues vaseuses qui ne faisaient rire que toi, sans te voir avachi dans le canapé à manger une glace 5 minutes avant le dîner, tout en regardant tes séries débiles à la télévision.
Non vraiment, tout cela est trop injuste.
Nous vois tu, de où tu es ? Vois-tu l’état dans lequel tu laisses notre famille ?
Les parents sont méconnaissables, Papa ne siffle plus, Maman ne sourit plus. La maison est triste, Brice et moi totalement désemparés. Ta chambre d'enfant ressemble à un mausolée, sans âme.
Une partie de moi t’en veut énormément.
Pourquoi prendre le volant alors que tu avais travaillé toute la nuit ?
Pourquoi ne pas avoir dormi ?
Pourquoi ne pas t’être arrêté pour te reposer en route ?
Pourquoi être si pressé ?
Tout ça pour quoi ? Pour foncer droit dans un camion et laisser ta peau sur cette maudite départementale 79 entre Chalons et Charolles ? Beau gachis !
Et puis … je réfléchis et je me dis que j’aurai fait pareil, trop impatiente d’aller embrasser la famille pour la nouvelle année et alors je ne peux même plus t’en vouloir.
Une main se porte sur mon visage … Une larme…
La première depuis le jour de ton enterrement …
Pourquoi est ce si difficile de penser à toi?
Je vais refermer là le livre de mes souvenirs, ça fait trop mal. Je vais garder ma colère qui m’aide à avancer, elle seule me sauve.
Je ne t’oublierai jamais … tu me manques mon Rémy.
Ven 24 Oct - 15:51